capítulo primero Viaje de un habitante de la estrella Sirio al planeta Saturno
Voyage
d'un habitant du monde de l'étoile
Sirius dans la planète de Saturne
Conversation de l'habitant de Sirius avec celui
de Saturne
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7.9
Chapitre sixième
Ce qui leur arriva avec les hommes
capítulo sexto
De lo que les aconteció con unos hombres
6.1
Micromégas, bien meilleur observateur que son nain, vit
clairement que les atomes se parlaient; et il le fit remarquer à son
compagnon, qui, honteux de s'être mépris sur l'article
de la génération , ne voulut point croire que de pareilles
espèces pussent se communiquer des idées. Il avait
le don des langues aussi bien que le Sirien; il n'entendait point
parler nos atomes, et il supposait qu'ils ne parlaient pas. D'ailleurs,
comment ces êtres imperceptibles auraient-ils les organes de
la voix, et qu'auraient-ils à dire? Pour parler, il faut penser,
ou à peu près; mais s'ils pensaient, ils auraient donc
l'équivalent d'une âme. Or, attribuer l'équivalent
d'une âme à cette espèce, cela lui paraissait
absurde. «Mais, dit le Sirien, vous avez cru tout à l'heure
qu'ils faisaient l'amour; est-ce que vous croyez qu'on puisse faire
l'amour sans penser et sans proférer quelque parole, ou du
moins sans se faire entendre? Supposez-vous d'ailleurs qu'il soit
plus difficile de produire un argument qu'un enfant? Pour moi, l'un
et l'autre me paraissent de grands mystères. — Je n'ose
plus ni croire ni nier, dit le nain; je n'ai plus d'opinion. Il faut
tâcher d'examiner ces insectes, nous raisonnerons après. — C'est
fort bien dit», reprit Micromégas; et aussitôt
il tira une paire de ciseaux dont il se coupa les ongles, et d'une
rognure de l'ongle de son pouce, il fit sur-le-champ une espèce
de grande trompette parlante , comme un vaste entonnoir, dont il
mit le tuyau dans son oreille. La circonférence de l'entonnoir
enveloppait le vaisseau et tout l'équipage. La voix la plus
faible entrait dans les fibres circulaires de l'ongle; de sorte que,
grâce à son industrie , le philosophe de là-haut
entendit parfaitement le bourdonnement de nos insectes de là-bas.
En peu d'heures il parvint à distinguer les paroles, et enfin à entendre
le français. Le nain en fit autant, quoique avec plus de difficulté.
L'étonnement des voyageurs redoublait à chaque instant.
Ils entendaient des mites parler d'assez bon sens: ce jeu de la nature
leur paraissait inexplicable. Vous croyez bien que le Sirien et son
nain brûlaient d'impatience de lier conversation avec les atomes;
il craignait que sa voix de tonnerre, et surtout celle de Micromégas,
n'assourdît les mites sans en être entendue. Il fallait
en diminuer la force. Ils se mirent dans la bouche des espèces
de petits cure-dents, dont le bout fort effilé venait donner
auprès du vaisseau. Le Sirien tenait le nain sur ses genoux,
et le vaisseau avec l'équipage sur un ongle. Il baissait la
tête et parlait bas. Enfin, moyennant toutes ces précautions
et bien d'autres encore, il commença ainsi son discours:
6.1
Mejor observador Micromegas que el enano, advirtió claramente que aquellos átomos se hablaban y así se lo hizo notar a su compañero, el cual, con la vergüenza de haberse engañado acerca del mecanismo de la generación, no quiso creer que semejante especie de bichos pudieran tener y comunicarse sus ideas. Micromegas poseía el don de lenguas, no menos que el siriano, y no entendiendo a nuestros átomos, suponía que no hablaban; y luego ¿cómo habían de tener órganos de la voz unos seres casi imperceptibles, ni qué se habían de decir? Para hablar es indispensable pensar, y si pensaban, llevaban en sí algo que equivalía al alma; y atribuir una cosa equivalente al alma a especie tan ruin, se le antojaba mucho disparate. Díjole el siriano: -¿Pues no creías, hace poco, que se estaban amando? ¿Pensáis que se hacen ciertas cosas sin pensar y sin hablar, o a lo menos, sin darse a entender? ¿Creéis que es más fácil hacer un chico que un silogismo? A mí, una y otra cosa me parecen impenetrables misterios. -No me atrevo ya -dijo el enano - a creer ni a negar nada; procedamos a examinar estos insectos y meditemos luego. -De acuerdo -respondió Micromegas. Y sacando unas tijeras se cortó la uña de su dedo pulgar con la que hizo una especie de bocina enorme, como un embudo inmenso, y luego se puso el cañón al oído; la circunferencia del embudo abarcaba al navío y toda su tripulación, y la más débil voz se introducía en las fibras circulares de la uña; de suerte que, merced a su ingenio, el filósofo de allá arriba, oyó perfectamente el zumbido de nuestros insectos de acá abajo, y en pocas horas logró distinguir las palabras y entender el idioma francés en que hablaban. Lo mismo hizo el enano, aunque no con tanta facilidad. Crecía el asombro de los dos viajeros al oír hablar con notable discreción y les parecía inexplicable este fenómeno de la naturaleza. Como podemos figurarnos el enano y el siriano se morían de deseos de entablar conversación con aquellos átomos; pero tenían miedo de que su voz atronara a los microbios sin que la oyesen. Trataron, pues, de amortiguar su intensidad, y para ello se pusieron en la boca unos mondadientes muy menudos, cuya punta muy afilada iba a parar junto al navío. Puso el siriano al enano entre sus rodillas, y encima de una uña, el navío con su tripulación; bajó la cabeza y habló muy quedo, y después de todas estas precauciones, y muchas más, dijo lo siguiente:
6.2
« Insectes invisibles,
que la main du Créateur s'est plu à faire naître
dans l'abîme de l'infiniment petit, je le remercie de ce qu'il
a daigné me découvrir des secrets qui semblaient impénétrables.
Peut-être ne daignerait-on pas vous regarder à ma cour;
mais je ne méprise personne, et je vous offre ma protection.»
6.2
-Invisibles insectos que la diestra del Creador se plugo producir en los abismos de lo infinitamente pequeño; yo os bendigo. Acaso luego me desprecien en mi Corte; pero yo a nadie desprecio, y os brindo mi protección.
6.3
Si jamais il y a eu quelqu'un
d'étonné, ce furent les gens qui entendirent ces paroles.
Ils ne pouvaient deviner d'où elles partaient. L'aumônier
du vaisseau récita les prières des exorcismes , les
matelots jurèrent, et les philosophes du vaisseau firent un
système ; mais quelque système qu'ils fissent, ils
ne purent jamais deviner qui leur parlait. Le nain de Saturne, qui
avait la voix plus douce que Micromégas, leur apprit alors en
peu de mots à quelles espèces ils avaient affaire. Il
leur conta le voyage de Saturne, les mit au fait de ce qu'était
monsieur Micromégas; et, après les avoir plaints d'être
si petits, il leur demanda s'ils avaient toujours été dans
ce misérable état si voisin de l'anéantissement,
ce qu'ils faisaient dans un globe qui paraissait appartenir à des
baleines, s'ils étaient heureux, s'ils multipliaient, s'ils
avaient une âme, et cent autres questions de cette nature.
6.3
Si hubo asombros en el mundo, ninguno llegó al de los que estas palabras oyeron, sin poder atinar de dónde salían. Rezó el capellán las preces contra el demonio, blasfemaron los marineros, e inventaron varios sistemas los filósofos del navío; pero a pesar de sus meditaciones, no les fue posible averiguar quién era el que les hablaba. Fue entonces cuando el enano de Saturno, que tenía la voz más débil que Micromegas, les explicó todo circunstanciadamente; el viaje desde Saturno, y quién era el señor Micromegas. Compadecido de que fueran tan chicos los habitantes de la Tierra les habló con ternura preguntándoles si habían sido siempre tan insignificantes y qué era lo que hacían en un globo que, al parecer, pertenecía a las ballenas. Les preguntó también si eran felices, si tenían alma, si se reproducían y otras mil preguntas por el estilo.
6.4
Un raisonneur de la troupe, plus
hardi que les autres, et choqué de ce qu'on doutait de son âme,
observa l'interlocuteur avec des pinnules braquées sur un
quart de cercle, fit deux stations , et à la troisième
il parla ainsi: « Vous croyez donc, monsieur, parce que vous
avez mille toises depuis la tête jusqu'aux pieds, que vous êtes
un... — Mille toises! s'écria le nain; juste Ciel! d'où peut-il
savoir ma hauteur? mille toises! Il ne se trompe pas d'un pouce .
Quoi! cet atome m'a mesuré! il est géomètre,
il connaît ma grandeur; et moi, qui ne le vois qu'à travers
un microscope, je ne connais pas encore la sienne! — Oui, je
vous ai mesuré, dit le physicien, et je mesurerai bien encore
votre grand compagnon. » La proposition fut acceptée;
Son Excellence se coucha de son long: car, s'il se fût tenu
debout, sa tête eût été trop au-dessus
des nuages. Nos philosophes lui plantèrent un grand arbre
dans un endroit que le docteur Swift nommerait, mais que je me garderai
bien d'appeler par son nom, à cause de mon grand respect pour
les dames. Puis, par une suite de triangles liés ensemble,
ils conclurent que ce qu'ils voyaient était en effet un jeune
homme de cent vingt mille pieds de roi.
6.4
Ofendido de que alguien dudase de si tenían alma, un sabio de la Tierra, más audaz que los demás, observó a su interlocutor con una pínula adaptada a un cuarto de círculo, midió los triángulos y por último dijo así: -¿Creéis, caballero, que porque tengáis una estatura de dos mil metros sois un...? -¡Dos mil metros? -exclamó el enano -. ¡No se ha equivocado ni en una pulgada! Así pues, este átomo ha podido medirme. Sabe matemáticas y ha determinado mi tamaño. En cambio, yo no le puedo ver sin el auxilio del microscopio y no sé qué dimensiones tiene. -Sí, supe mediros -dijo el matemático - y podré hacer lo mismo con el gigante que os acompaña. Admitida la propuesta, se tendió Su Excelencia en el suelo, porque estando en pie, su cabeza se perdía en las nubes, y nuestros filósofos le plantaron un árbol muy grande en cierto sitio que el doctor Swift hubiera designado por su nombre, pero que yo no me atrevo a mencionar por el mucho respeto que tengo a las damas. Luego, mediante una serie de triángulos que trazaron y relacionaron unos con otros, sacaron en consecuencia que la persona que medían era un sujeto de veinte mil pies de estatura.
6.5
Alors Micromégas prononça
ces paroles: « Je vois plus que jamais qu'il ne faut juger
de rien sur sa grandeur apparente. O Dieu! qui avez donné une
intelligence à des substances qui paraissent si méprisables,
l'infiniment petit vous coûte aussi peu que l'infiniment grand;
et, s'il est possible qu'il y ait des êtres plus petits que
ceux-ci, ils peuvent encore avoir un esprit supérieur à ceux
de ces superbes animaux que j'ai vus dans le ciel, dont le pied seul
couvrirait le globe où je suis descendu.»
6.5
Micromégas äußerte sich dann folgendermaßen:" Ich
sehe nun deutlicher als jemals, dass man aufgrund der offensichtlichen
Größe keinerlei Schlüsse ziehen kann. Oh mein Gott!
Wer hätte anscheinlich so erbärmliche Substanzen mit Intelligenz
ausgestatt, das unendlich Kleine kostet Sie so wenig, wie das unendlich
Große. Und es ist möglich, dass es noch kleinere Wesen
gibt als jene und dennoch mehr an Verstand haben als jende Riesentiere
die ich im Himmel sah, deren Füße die Welt bedecken würde,
auf der ich mich jetzt befinde."
6.6
Un des philosophes lui répondit
qu'il pouvait en toute sûreté croire qu'il est en effet
des êtres intelligents beaucoup plus petits que l'homme. Il
lui conta, non pas tout ce que Virgile a dit de fabuleux sur les
abeilles, mais ce que Swammerdam a découvert, et ce que Réaumur
a disséqué . Il lui apprit enfin qu'il y a des animaux
qui sont pour les abeilles ce que les abeilles sont pour l'homme,
ce que le Sirien lui-même était pour ces animaux si
vastes dont il parlait, et ce que ces grands animaux sont pour d'autres
substances devant lesquelles ils ne paraissent que comme des atomes.
Peu à peu la conversation devint intéressante, et Micromégas
parla ainsi.
6.6
Respondióle uno de los filósofos que bien podía creer, sin duda alguna, que había seres inteligentes mucho más pequeños que el hombre, y para probárselo le contó, no las fábulas de Virgilio sobre las abejas, sino lo que Swammerdam ha descubierto, y lo que ha disecado Reaumur. Díjole también que hay animales que son, con respecto a las abejas, lo que las abejas con respecto al hombre y le hizo notar lo que el propio siriano significaba en relación con aquellos animales enormes a que se había referido; a su vez, estos grandes animales comparados con otros, parecen imperceptibles átomos. Poco a poco fue haciéndose interesante la conversación. Micromegas se expresó así: